Par Ann Cremin
La Biennale de Lyon est dans sa vingtième année – c’est un cap difficile à passer, d’autant plus que le même Thierry Raspail en est toujours le directeur artistique – il invite un ou plusieurs commissaires étrangers chaque fois pour l’aider dans ses choix. La dernière m’avait semblée plutôt faiblarde, sans aucun lien entre les différentes expositions. Ceci est d’autant plus évident que les expos se déroulent dans de nombreux endroits très différents les uns des autres – le MAC, le Musée des Beaux Arts, et plus important, la Sucrière. Ce lieu est le plus emblématique : sur les berges de la Saône, cet ancien entrepôt de sucre, parmi d’autres bâtiments de même acabit, était le lieu où les douanes pouvaient vérifier les marchandises qui voyageaient à travers l’Europe. Ce quartier, appelé La Confluence – où la Saône et le Rhône se rejoignent pour encercler la ville – est en cours de développement intensif, ou d’ailleurs un musée doit bientôt voir le jour – une sorte de réponse française à Bilbao et son Guggenheim…
Ces dernières années, La Sucrière est devenue plus accessible grâce aux transports en commun et pendant la Biennale, il y avait même un transport fluvial la reliant au MAC. C’est dans la Sucrière qu’a eu lieu l’inauguration de la Biennale – l’espace gigantesque rempli d’installations de toutes sortes et de toutes dimensions – entre autre une « bibliothèque » pour laquelle il fallait monter deux étages afin de la contempler : une énorme pièce, poussiéreuse, remplie de rayonnages débordant de livres, un bureau, des papiers dans tous les sens, l’impression d’une vie à peine interrompue…
J’ai demandé à Victoria Northroon, la commissaire invitée, pourquoi elle avait choisi des « icones » irlandaises ? En fait, elle vit à Buenos Aires et connait bien les artistes Latino-Américains ainsi que ceux de pays «émergents » comme l’Afrique du Sud, etc. « Lorsque Thierry Raspail m’a contacté il y a deux ans, pour la Biennale, il m’a donnée carte blanche. Je voulais voir de plus près les jeunes artistes à travers le monde et je me suis lancée. Une fois que j’avais plus ou moins arrêté mes choix, mon problème était de leur trouver un thème commun. Mon mari est un écrivain, particulièrement au courant de la littérature anglo-irlandaise – alors quand il m’a parlé de Yeats et de son poème (en anglais) sur la révolution de Pâques en 1916, à Dublin, j’ai trouvé que cela exprimait précisément ce que je ressentais : la beauté d’un geste peut avoir des conséquences terribles… »all
L’exposition est très polyvalente et traverse la ville de part en part : dans la Grand Parc Miribel Jonas, l’artiste en résidence Yona Friedman propose une vision du musée du XXIème siècle, intitulée « Iconostase » : une série de cercles en acier d’un diamètre de 3m sont assemblées dans l’espace – c’est au public lui-même de les installer à son gout. Ceci reflète bien l’esprit de la Biennale cette année où se trouvent beaucoup plus de vidéos et d’installations que de peintures ou de sculptures plus traditionnelles. Le public joue un rôle prépondérant dans les installations, on lui demande son avis et ses commentaires, quant aux œuvres des artistes.
Tous les musées, galeries et fondations de la ville ont joué un rôle dans cette Biennale, dans un projet intitulé Résonances. Il y avait des expos individuelles dans des ateliers, comme celle de Lionel Stoccard, d’autres comprenaient de nombreux intervenants. La Fondation Bullukian, un lieu délicieux au cœur de la ville, place Bellecour, a réussi à exposer quatre artistes d’horizons très variés : un Sud-Africain, deux Latino-Américains et un Lyonnais se répondaient joyeusement. Le projet Veduta s’est étendu à toutes formes de crétaion : musique, theatre, architecture, entre autres, à travers totue l’agglomération. Le MAC a divisé chacun de ses trois étages en deux, ce qui a donné lieu à six expositions très différentes les unes des autres. En réalité, il est difficile de donner une vue d’ensemble puisque l’objet principal en était que toutes la ville participe activement à cette joyeuse fete.
Cependant, à mon sens, l’une des manifestations les plus réussies, est l’exposition au Musée des Beaux Arts, place des Terreaux. Intitulée « Ainsi soit-il », cette expo est placée sous l’égide d’Antoine de Galbert, collectionneur d’art contemporain et créateur d’une fondation à Paris : La Maison Rouge. En collaboration avec Sylvie Ramond, conservateur du musée lyonnais, il a choisi parmi les collections sept œuvres « emblématiques » et il les fait dialoguer avec une soixantaine d’oeuvres de sa propre collection. Le thème pourrait se résumer à la foi – pas forcément religieuse, mais une foi dans l’art, dans l’homme, une forme d’engagement en somme. Donc nous voyons un Géricault cotoyer Arnulf Rainer ou Lucio Fontana, ainsi que François Morellet. « Je ne voulais pas donner l’impression que je m’approprie les œuvres du musée – au contraire, je cherche des correspondances, des concordances entre mon propre gout et les grands trésors. » Il y a beaucoup de photographies, des dessins, des installations….
Pour finir, Lyon continue sur sa lancée énergique sur tous les fronts culturels. La Fête des Lumières, qui a commencé en 2011, le 8 décembre, illumine toute la ville – une tradition qui remonte au milieu du XIXe siècle lorsque les Lyonnais promirent à la Vierge Marie de célébrer dignement sa naissance si la ville échappait à un fléau imminent. Depuis ce temps là, chaque fenêtre est éclairée par une bougie le 8 décembre – depuis quelques années la ville en a fait une Fête internationale en invitant des artistes du monde entier à participer pen créant des œuvres de lumière, specialement pour cette nuit-là. C’est un moment magique et inoubliable.
Ann Cremin, (Lyon 2011)
La Biennale en Image
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