Par Geneviève Guihard
On entre en « Conciergerie » comme dans une forêt d’arbres, forêt évoquée par les nervures fines et enlacées, les arêtes des voûtes de l’architecture gothique de cet illustre Monument.
Dans cet espace immensément ouvert, la sensation de pénétrer dans une nature sauvage surprend le visiteur.
L’exposition présentée jusqu’au 11 mars 2012, baptisée « Bêtes off », regroupe les œuvres de 45 artistes contemporains de différentes nationalités. Elle invite à une forte prise de conscience de la relation entre l’homme et l’animal, suscite des idées-forces et déclenche une litanie de questionnements.
Tout d’abord, l’idée de frontière, entre humanité et animalité, autrefois fossé infranchissable entre les deux genres, est aujourd’hui une frontière assumée comme le montre certains points de perméabilité entre les deux espèces. Le rôle de la peau de la bête perçue également comme une frontière est suggérée dans certaines belles œuvres de Gavin Younge.
L’évocation du transfert affectif entre l’homme et l’animal, montre l’antipathie exercée par les araignées, mouches emprisonnées, mais à contrario la sympathie instantanée éprouvée pour le cheval, jusqu’à la fusion entre l’homme et l’animal révélée par l’œuvre de Muriel Toulemonde.
La tentative de percevoir l’intériorité de l’animal ainsi que le territoire que nous leur laissons avec l’idée de cages et d’enfermement est amplement mise en évidence dans « La danse des abeilles ». de Vaulot et Dyèvre.
La relation entre la chasse et la guerre, l’idée de l’homme capable de se détruire lui-même, l’apocalypse liée à l’incurie de l’homme apparaît dans « Skin » de Dimitri Tsykalov.Toutes ces œuvres bousculent notre imaginaire, et incitent à réfléchir sur la place que tient l’animal dans l’art contemporain.
Les artistes exposés sont talentueux, et leurs œuvres dégagent toutes une force poétique.
Claire Morgan, artiste irlandaise née à Belfast en 1980, propose une œuvre singulière intitulée : « Here is the End of all Things ».
Le vol d’une chouette, vol matérialisé par l’animal à plumes, arrêté, figé, pétrifié dans son vol, comme un « arrêt sur images », tandis que la bête se métamorphose laissant apparaître un côté oiseau, un côté mouche, impressionne. Son vol est entravé (ou sublimé) dans quatre cubes aériens confectionnés en graines de pissenlits, chardons et faux moucherons.
L’émotion est première, sans pathos. Les sujets traités sont graves, peu tendres, évoqués sans violence, même si notre humanité et sa relation avec le genre animal, est parfois mise à mal.
Le but affiché étant de ne pas choquer mais de nous émouvoir, le pari est plutôt réussi.
Conciergerie
2 boulevard du Palais 75001 Paris
www.conciergerie.monuments-nationaux.fr
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